Accumuler les expériences au féminin

Ce samedi, j'ai accumulé les expériences au féminin :-)

Le matin, courses hebdomadaires au supermarché. Plus de monde que d'habitude, si bien qu'il m'a fallut faire la queue aux caisses. Alors que j'attendais mon tour, je remarque que la caissière me regardait souvent. Gênée, je détourne la tête et m'aperçois du regard insistant d'une jeune femme qui attendait à la caisse voisine. Ma première réaction fut de croire que j'étais "découverte", qu'elles avaient vu pour je ne sais quelle raison, que j'étais transgenre. Je sentais que j'allais m'emballer dans cette idée alors je me suis forcée à penser autrement. Si j'étais l'objet de leur attention c'est qu'elle me trouvait jolie, ou du moins, que "mon look" les intéressait. Je n'ai donc pas changé de caisse, prête à voir ce qu'il en était. La caissière m'accueille d'un bonjour Madame. Je lui rends la politesse et le défilement des articles commence. Au moment de payer, je prends le temps de lui demander si elle mettait ses pendants, qui étaient forts imposants, après son masque. Elle acquiesça. Je continuai en lui disant que c'était à cause de la difficulté de mettre le masque avec des longues boucles d'oreille que je n'en mettais plus et cela me manquait. "Vivement que l'on ne soit plus obligées de mettre de masque", conclu-t-elle. Le règlement effectué, en me tendant le ticket de caisse, elle me surprit en me disant "A bientôt" tout en me faisant un signe d'au revoir en agitant la main. C'est la première fois qu'une caissière prend congé ainsi de moi. Le sourire caché derrière mon masque, je pris le chemin du retour au parking, en pensant que j'avais bien fait de ne pas me laisser aller dans des peurs concernant ma transidentité, consciente qu'il arrive parfois que ce soit nous qui interprétons mal les réactions des autres.

Je ressortis l'après-midi pour aller acheter un congélateur, le notre s'évertuant à faire de la glace en grande quantité. Sans doute, un problème d'étanchéité du caoutchouc de la porte. En passant dans la rue commerçante, je remarque que le magasin de lingerie est ouvert. Curieuse, je franchis le seuil de la porte. Personne à l'intérieur. Une femme sorti d'un rideau du fond de la boutique. C'était la gérante. Comme j'étais sur place et que l'on ne trouve pas de bas en vente dans les grands magasins, je lui demandai si elle vendait des "bas qu'on attache". Elle me montra des modèles. Ayant payé mes achats, je m'inquiétais auprès d'elle pour savoir pourquoi elle avait l'autorisation d'ouvrir alors que les boutiques de vêtements sont fermés. Elle m'expliqua qu'elle avait initialement une spécialité orthopédique, qui même si elle n'était plus sa raison commerciale majoritaire, lui donnait le droit d'ouvrir. Et nous sommes parties dans une longue discussion, parlant de tout, de notre vie. Notre échange s'est prolongé facilement une bonne heure.
En sortant, je me suis rendue compte que, contrairement à mon intention de me rendre dans ce genre de magasin le jour où je me sentirai au moins sûre de ma voix, j'avais vécu cette première expérience sans m'en rendre compte, comme si elle allait de soi. Je voyais bien qu'elle regardait mon corps d'un oeil professionnel, jugeant aisément des tailles qu'il me faudrait, prête à me conseiller suivant les articles en vente dans sa boutique.

Cela dit, j'y retournerai pour acquérir d'autre bas et peut-être de la lingerie de nuit, mais je ne me sens pas encore prête à aller plus loin, de peur qu'elle s'aperçoive que je n'ai pas de seins. Et oui, je n'arrive pas encore à desserrer complètement mes propres freins.

Cependant, je souhaitais partager cette "aventure" avec vous les amies, toute heureuse de ces relations vécues en tant que femme, car je dois vous avouer que j'avais oublié que j'étais transgenre, rassurée que cette dame me considérait comme une de ses autres clientes.

Bises

aventure très positive, merci à toi Daniéla de nous en avoir fait part.
bises
Sophie

...


c est toujours un bonheur de lire tes recits

d abord parce que l'on reve d en vivre d identique (que parfois on réalise dans l indifférence génerale ..)

et puis c est tellement interessant cette feminité qui passe par le verbe plutôt que par l'image

superbe aventure Daniela.. Et crois moi, même si elle se son rendues compte que tu étais une femme différente, ta simplicité a fait la différence.. De plus tu restes une cliente donc ..

Hello Daniela,
je pense que  souvent nous "projetons " nos craintes sur notre apparence , que les  femmes (généralement) nous identifie n'est à mon sens pas gênant , elle voit une identité féminine en premier lieu , et tu as un passing qui te permet d’échanger sans crainte avec une consœur  cis .
Très sympa ton expérience dans une boutique qui est par excellence, un espace exclusivement feminin,  même si les hommes franchissent le seuil pour offrir (ou s'offrir ,mais là c'est perso....) un présent très sensuel .
Et le congélo alors ??? Une autre anecdote à venir !!!

Chère Danièla
Très belle expérience que moi même je voudrais vive rapidement. 
Comme on dit cela me démange. Et tu as bien fait de les tes appréhensions.
Je vais même t'encourager à acheter de la lingerie j'ai eu cette expérience et les gérantes de ces boutiques peuvent bien te conseiller.
Oh oui j'aurai aimée être à ta place.
Bisous
Andeline

Un petit mot Danièla
Les Femmes cis sentent notre féminité bien avant de comprendre que nous sommes trans et rare sont celles qui nous rejette, que bien du contraire
Je te parle par expérience

Superbe récit Danièla...
J'ai raconté il y a peu un achat dans un e boutique de lingerie bien que j'étais au masculin.
Je me suis présentée simplement et la responsable de la boutique a été très sympa et compréhensive...un vrai bonheur.

Merci encore pour ton partage qui nous encourage.
Bizzz

un récit qui nous pousse à dépasser nos craintes des sorties en public.
quand ce foutu confinement se terminera et quand je retrouverais un semblant de tranquillité, peut-être ...

Le post de Daniela m'interpelle surtout pour l'état d'esprit qu'il évoque, quand on se retrouve dans des situations où on finit par oublier notre statut un peu "préfabriqué" pour tomber dans des situations "naturelles"

Hier par exemple j'ai pris le tracteur pour débarrasser quelques remorque de cailloux dans un coin de campagne tranquille où ça ne dérangeait personne, mais malheureusement un peu éloigné de la ferme

Je portais ma dernière acquisition dont je suis tres fière, une salopette-jupe qui pour une fois n'est pas taillée comme un sac à patates . . . mais quand même assez courte . . . le reste étant bien sur assorti en consequence, poitrine gonflée, cheveux au vent, collant laine, bottes a talons de 5 cms . . . .

Evidemment pendant les trajets j'ai croisé du monde, dont un voisin qui me connaît bien (évidemment en mode plutôt Dédé . . ) et ma réaction m'a surprise, le seul souci qui me soit passé par la tete  a été de resserrer les jambes le plus possible et de tirer desespérément sur ma jupette pour la faire descendre un peu . . . au moment de le croiser le sourire amical et le signe de la main sont venus de façon  totalement naturelle . . .

Des petits moments de féminité inattendus mais oh combien  délicieux . . . on ne "joue" plus un rôle, on est devenue une personne réelle . . .

Et on oublie totalement ce "frein" fort justement cité par Daniela . . . c'est bien lui notre meilleur ennemi, il est certainement bien pire que la plupart des remarques plus ou moins désobligeantes . . . enfin pour ma part je le croise vraiment bien plus souvent que les remarques désagréables ou les regards réprobateurs . . .

Chère Stéphanie
Tu nous as mis en confiance à travers cette expérience. oui très bonne réflexion.
Pourrais-tu l'agrémenter d'une photo de toi en salopette-jupe avec ton tracteur.
Je t'embrasse
Andeline :bohner:

Andeline a écrit:Chère Stéphanie
Tu nous as mis en confiance à travers cette expérience. oui très bonne réflexion.
Pourrais-tu l'agrémenter d'une photo de toi en salopette-jupe avec ton tracteur.
Je t'embrasse
Andeline :bohner:

Eh zut, j'ai oublié de demander au voisin quand je l'ai croisé, lol, va falloir que je ressorte le tracteur . . .

je promets d'y penser, j'ai des demandes de photos en retard . . .

Merci à toi Daniela, ce genre de récit me donne du baume au coeur.

En ce qui me concerne j’avoue sortir très rarement complètement au féminin mais dans les magasins qui m’intéressent je n’hésite plus à dire que les articles me sont destinés . « -Vous connaissez la taille de Madame ? - non en fait c’est pour moi .... »

Dans la grande majorité des cas, les personnes se montrent bienveillantes et le plus souvent sont aux petits soins.
Pour l’anecdote, j’ai trouvé une lingerie dont la responsable, plus de 60 ans, a un coup d’œil expert pour trouver les articles adaptés à nos courbes plus masculines. C’est un vrai bonheur !

Encore merci Daniela pour cette parenthèse !

Mlle_helened a écrit:un récit qui nous pousse à dépasser nos craintes des sorties en public.
quand ce foutu confinement se terminera et quand je retrouverais un semblant de tranquillité, peut-être ...

Merci Hélène de ce retour. Je t'ai prise en exemple mais j'aurai pu aussi prendre d'autres commentaires qui me poussent à partager ici les expériences vécues en tant que femme transgenre.

Le seul point qui m'attriste, est quand tu ajoutes à la fin "peut-être". Cependant je ne pousse personne à se jeter à l'eau car j'ai tendance à penser que les expériences viennent quand on peut les accepter. Par contre, il ne faut pas les rejeter.

Pour revenir sur le magasin de lingerie, ce n'était pas du tout celui où j'avais projeté d'entrer lorsque j'aurai une meilleure voix. Mais le fait qu'il soit ouvert en plein confinement, m'a poussée à en franchir le seuil par curiosité.

J'ai mis ces deux anecdotes, celle du supermarché et celle du magasin, dans le même sujet, déjà pour ne pas multiplier les sujets et parce qu'elles avaient eu lieu le même jour.

Après coup, et cela a été noté par certaines, elles montrent bien où j'en suis vis à vis de ma féminité. Dans le premier cas, j'ai encore un doute, comme lorsque j'avais 20 ans et que je me retrouvais seule face à mon miroir, maquillée et habillée, me demandant pourquoi, et surtout qu'en faire. Et lorsque je me démaquillais pour sortir dans la rue, j'avais l'impression que la maquillage réapparaissait, comme en transparence. Une consoeur amie me disait que c'était dû à ma honte. Et bien, j'ai peut-être encore ce sentiment, car vraiment rien ne pouvait justifier d'être perçue comme transgenre, quand j'étais dans la file de la caisse.

En sortant du magasin de lingerie, je me suis rendue compte que nos échanges avec la gérante, avaient duré plus d'une heure ! Et je me suis dit qu'un homme n'aurait jamais parlé autant dans la même situation. Et pour tout vous dire, je me suis aussi rendue compte que j'avais été dans un lieu où ma femme ne se rend jamais. Et lorsque je lui ai dit à mon retour, elle n'a pas donné signe de vouloir s'y rendre. Pour elle, j'avais simplement acheté des bas. Pour moi, cela allait bien au-delà.  C'est comme si une autre couche de féminité s'était épanouie en moi, dont je ne soupçonnais pas l'existence.

Comme beaucoup, je me suis attardée à mon apparence physique, au passing comme on dit. Le but était que l'extérieur correspondait à ce que je ressentais à l'intérieur, croyant qu'il ne s'agissait que de cela pour être femme. Et puis, j'ai commencé à avoir des formules de politesse, bonjour Madame, merci Madame, au revoir Madame. Et si au début cela me surprenait, car pas habituée, je me suis sentie inscrite plus sûrement dans ma féminité. Elle ne se situait plus uniquement au niveau de l'épiderme. Au fur et à mesure, les dialogues sont devenus plus longs, jusqu'à cet échange récent qui m'a permis de prendre conscience que ma féminité était plus riche, plus entière. Presque comme si je pensais en tant que femme.

Alors ces deux anecdotes montrent où j'en suis. Encore des doutes et des craintes, et en même temps une confiance de ne pas me tromper quand je me présente comme femme aux yeux des autres.

J'aimerais terminer mon retour d'expérience en remerciant aussi celles qui partagent les leurs. Cela enrichit le sujet et j'espère, prouve à celles qui "rêvent" d'en vivre identiques, qu'il n'y a pas par naissance, celles qui peuvent et celles qui ne peuvent pas. Pour tout vous dire, j'ai longtemps, très longtemps cru, que les magasins de lingerie me seraient à jamais interdits, car pas née femme. Pour moi c'étaient des antres de la féminité, tout comme les magasins de maquillage et les salons de coiffure, et qu'il fallait être née femme pour y aller et y être reçue en tant que femme.

Alors les amies, si vous sentez que c'est le moment d'y faire vos pas, n'hésitez pas. Rien n'est inscrit d'avance.

Bises

De très beaux récits...simplement merci et moi qui est achetée de la lingerie en boutique en mode masculin et bien j'ai passé un moment merveilleusement féminin.
C'était pourtant la première fois que je passais la porte de cette boutique.

Daniela a écrit:Ce samedi, j'ai accumulé les expériences au féminin :-)

Hello Daniela, merci pour ce témoignage...
j'ai été plus paresseuse que toi, j'ai fait cela sous forme de vidéo...
bises

Oups, ça dit "vidéo non disponible".

Pérèle a écrit:Oups, ça dit "vidéo non disponible".

il faut aller la regarder sur Youtub

Ok
Merci