Comment réagissez-vous lorsque vous êtes abordée par un homme dans la rue ?

M'étant réveillée hier matin en me sentant très femme, après ma journée de travail, je me suis octroyée une petite sortie pour effectuer quelques achats. Le vent soufflait et quelques gouttes de pluie tombaient par intermittence. Abritée dans la boutique, j'ai pris le temps de parcourir les rayons, où j'ai croisé quelques clients. Profitant d'une éclaircie passagère, je suis sortie. A peine quelques pas effectués, je suis rejointe par un homme qui venait du même magasin. Il m'interroge sur mes achats. Détendue je lui réponds calmement. Très vite il m'invite à l'accompagner à une soirée où il se rend. Je décline son offre en lui indiquant que je pars le jour même en province, pour le weekend.
La discussion se poursuit sur le même ton aimable, et je lui fais comprendre que j'ai un ami régulier. Il n'insiste pas et je prends congés en lui souhaitant une bonne soirée.

Durant le trajet, coincée dans les bouchons pour sortir de Paris, j'ai eu tout le loisir pour me remémorer cet épisode, et j'ai pris conscience qu'en fait j'avais été "draguée" par un inconnu. Cependant j'étais restée posée, ne me sentant pas en danger.
Je me suis souvenue, lorsque j'étais (plus) jeune, de mes réactions de panique lorsqu'un homme m'adressait la parole dans la rue. Je me risquais seulement à répondre par un sourire aux vendeurs qui me souhaitaient le bonsoir (j'attendais que le jour décline pour sortir) lorsqu'ils prenaient l'air sur le seuil de leur commerce. Et si un homme m'apostrophait directement, muette de peur, je retournais vite à ma voiture où je m'enfermais.
Je craignais que ma voix amène mon interlocuteur à se rendre compte que je n'étais pas une femme bio mais transgenre. Et je n'osais imaginer sa réaction au moment de "la révélation".

Alors que cette fois-ci, j'ai répondu simplement. J'ai été surprise, et flattée aussi, qu'il s'intéresse à moi. Au lendemain de "cette aventure", je me demande s'il avait compris que j'étais transgenre, ou s'il garde de moi l'image d'une femme cisgenre, ou peut-être il s'en fiche et ne se pose pas la question.

Si je relate cette histoire, c'est parce que ma réaction d'accepter cet échange inattendu, m'incite à penser que je me sens désormais sereine avec ma féminité. Je ne dis pas que je suis parvenue à l'équilibre parfait, mais je ne suis plus honteuse de ce que je suis (et de ce que je ne suis pas). C'est de l'ordre de l'acceptation, qui n'est pas une renonciation, au contraire, elle me donne "la force" d'aborder chaque situation (enfin presque). Je dis force mais j'aurais pu écrire la stabilité, l'ancrage. Je suis moi.

Toutefois, si j'avais été libre, et que j'avais suivi cet homme, qu'elle aurait été sa réaction lors "de la mise à nue" ? Cette éventualité que l'autre s'estime "trompé" par notre apparence, subsiste, même si sur l'instant elle n'est pas venue à ma pensée.

D'où la question du titre, car je suis curieuse de savoir comment vous réagissez dans ces moments, lorsqu'un homme (cela peut être aussi par une femme) ignorant tout de vous, vous propose une relation avec lui, qu'elle soit intime ou amicale.

Merci d'avance pour votre sincérité.

Bises

Daniela a écrit:D'où la question du titre, car je suis curieuse de savoir comment vous réagissez dans ces moments, lorsqu'un homme (cela peut être aussi par une femme) ignorant tout de vous, vous propose une relation avec lui, qu'elle soit intime ou amicale.

Dans ce débat je fais clairement la distinction entre l'aspect social et la dimension sexuelle de notre genre.

S'il s'agit d'une relation amicale, je considère que ma transidentité ne peut et ne doit pas être un obstacle. Donc je ne l'évoque pas. Tout simplement. Si la personne prend conscience tardivement et vient à remettre en cause notre relation.. Qu'il aille se faire voir !  C'est clairement comme ça que je fonctionne actuellement. Je n'ai pas à me justifier ou m'excuser d'être transgenre.

S'il s'agit de rapports intimes là c'est différent. Je conserve une distance jusqu'à ce que je puisse aborder la question. Et je fais très attention de ne pas le laisser se mettre en posture délicate tant qu'on a pas éclairci ce point entre nous. Sauf si c'est pas nécessaire parce que de toute évidence il sait..

Voilà ma belle..

Coucou,

Cela m'est arrivé aussi d'être draguée respectueusement et j'ai trouvé cela très chouette !
En fait, je n'ai pas pensé à ce qu'il fallait dire ou pas ! Là dans mon cas, mais aussi je pense dans ton histoire ici, ce n'est pas indispensable de le dire.

Il me semble que dès lors que l'on pense qu'il peut y avoir une relation de sexe, de désir, un coup de foudre ou une amitié profonde, il faut dire que l'on est transgenre. La prise de conscience chez l'autre peut être terrifiante pour lui mais aussi pour toi, pour nous. Il faut éviter, à mon sens, la soudaineté, la surprise de cette découverte.
La seule exception est pour la transgenre opérée. Elle est devenue une femme et elle n'est pas concernée.


Julie

Pour ma part si un homme me fait des avances je lui déclare tout de go que je ne suis pas intéressée, je suis lesbienne.
Si c est uniquement par amitié je lui dit que je suis une transgenre ,et lui demande si ça ne le dérange pas .
Si c est une femme cisgenre je le lui dit également mais avec un ton très doux et lui fait remarqué les avantages ( si si il y en a)

Ce qui est particulièrement intéressant dans ton récit, Danièla, c'est ton basculement désormais dans une identité féminine vécue et non plus seulement désirée ; car, c'est ce qui, à mon avis, conditionne aussi l'approche des tiers.

Tu te demandes s'il t'avait perçue comme trans et si cela pouvait être sa motivation ; compte tenu de ton passing et surtout de cette perception de toi-même comme femme, il t'a très probablement considérée comme femme bio et adopté le comportement "usuel" de l'homme en quête d'une bonne aventure.

L'attitude "normale" face à cette situation est, à mon sens, la même que celle d'une femme bio sur le plan basique (je suis libre ou pas, il me plaît ou pas, il correspond à mon orientation sexuelle ou pas, etc). Sauf que se rajoute la "complication" de l'identité physique, qui pose le délicat problème : sait-t-il ou pas, comment le lui dire ?
La distinction faite par Avalon entre relation d'amitié et relation sexuelle est juste, à ceci près que l'on n'est pas abordée dans la rue par quelqu'un en quête d'amitié !

Mais si j'ai bien compris le sens de la question, cela revient plutôt à : comment se sortir honorablement de ce genre de situation, en évitant d'être discourtoise ou en évitant des ennuis dus à une révélation de l'identité, qui peut entraîner une réaction de frustration agressive chez le "soupirant". Ton attitude, Daniela, est la bonne pour celles qui peuvent se permettre un dialogue un peu délicat, pour les autres le refus silencieux avec un demi-sourire pour le faire passer est plus indiqué. A l'époque où j'ai moi-même connu ce genre de situation, je coupais court au dialogue en exhibant mon alliance et en murmurant avec un grand sourire "Impossible, vous voyez bien !". Le sourire et l'alliance faisait passer inaperçue la tonalité de la voix....

Merci les amies pour vos contributions, toutes intéressantes et qui correspondent à la personnalité de chacune.

Oui ma question revenait à "faut-il, et quand révéler sa transidentité quand l'interlocuteur l'ignore ?", et je n'attendais pas à obtenir en réponse, ni une manière type de se comporter, ni le manuel complet pour faire face à toutes les situations.

Toutes vos interventions enrichissent "notre communauté"*, car elles montrent bien qu'un jour, lorsque nous commençons à sortir de notre salon, nous sommes amenées à vivre une situation similaire.

Je vous souhaite de continuer à vivre de beaux jours en toute féminité, et vivre de belles rencontres, qu'elles soient issues de connaissances, ou des inattendus de la vie.

Bises

(*) J'ai mis entre guillemets le mot communauté car c'est un mot que j'évite, car il sous-entend l'exclusion des autres, de ceux qui n'appartiennent pas à cette communauté, qui ne répondent pas aux critères. Mais je n'ai pas trouvé mieux, car je voulais inclure aussi celles qui ne se sont pas exprimées sur le sujet, et qui seront peut-être amenées à vivre ce genre de situation un jour. Si j'avais écris simplement "qui nous enrichissent toutes", cela pouvait laisser penser que cela se limitait à celles qui avaient réagi.

Je suis assez rarement abordée par des hommes dans le rue mais je constate que le regard des hommes à mon égard à changer , il est plus sympathique et bienveillant , au début j'étais abordée par des types qui voyait en moi un travestit , ou une transidentitaire , maintenant il me vois plutôt comme une femme d'age mur et j'ai le droit semble t'il à plus de respect .

Je n'ai jamais été draguée mais, en effet, j'ai apprécié la galanterie de certains messieurs (généralement d'âge mûr, mais je le suis aussi, alors ...).

Cette marque de respect est très agréable.

Bises
Aurélie

Je sors assez souvent en femme (beaucoup plus qu'en homme d'ailleurs) et il est vrai que les regards sont parfois agrémentés de quelques mots qui se veulent gentils mais que je sens toujours curieux, mais fort heureusement toujours polis !
Ce sont souvent des messieurs d'âge mûr ce que j'accepte en souriant et en répondant avec humour, car l'on reste dans le cadre d'un échange courtois, et j'avoue aimer les regards et les remarques de certains messieurs...
Par contre, les rares fois où un homme (et c'était à chaque fois un "jeune" homme !) s'est cru autorisé à une remarque salace ou à un geste déplacé en public, j'ai vivement protesté, ce qui a eu pour effet de le surprendre, et je me suis rapidement éclipsée sans plus insister afin d'éviter toute escalade… Avec certains jeunes coqs il faut savoir à la fois user d'une certaine autorité - que m'autorise mon âge - mais savoir également désarmer et se retirer prudemment si l'on sent la moindre agressivité. J'ai encore en mémoire les images de Julia sortant du métro République au milieu d'une foule rassemblée, et dans une telle situation il n'y a aucune honte dans le retrait prudent et discret.