En finir avec la transphobie
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Annabelle46
Mirabelle
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En finir avec la transphobie
Le 4 juin, à Nancy, deux femmes se sont mariées. Rien ne pouvait s'y opposer, a confirmé le procureur de la République à l'adjoint chargé de la célébration : les deux personnes concernées sont juridiquement de sexes opposés. L'une est une femme "biologique", l'autre est une femme transgenre qui a conservé son état civil masculin, n'ayant pu obtenir son changement d'état civil devant la cour d'appel de Nancy. Ce mariage est donc directement lié aux absurdités de la situation des personnes transgenres en France.
Passons sur les stigmatisations : musulmans, Noirs, d'autres encore, les connaissent aussi. On insistera plus sur des anathèmes liés à une religiosité mal placée : après le pacs (on se souvient de la Bible agitée en 1999 à l'Assemblée nationale), Christine Boutin, députée UDF des Yvelynes, s'est trouvé une nouvelle cible : le "genre".
En 2010, au nom d'une vision archaïque des rapports entre sexes et avec l'appui du gouvernement, elle s'est opposée à l'inscription dans les lois antidiscrimination de la transphobie, pourtant condamnée par le Conseil de l'Europe et la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH); le pouvoir se défend lui-même, car il pratique au quotidien la transphobie d'Etat, y compris contre certains de ses fonctionnaires humiliés, harcelés, placardisés.
Le gouvernement français contre la liberté du genre... En France, ce n'est pas le droit qui s'adapte au corps (contraception et interruption volontaire de grossesse ont été arrachées de haute lutte !), mais le corps qui s'adapte au droit. Pourtant, c'est une jurisprudence archaïque, bricolée le 11 décembre 1992 par la Cour de cassation après la condamnation de la France par la CEDH, qui a permis en 2011 à deux femmes - dont une transgenre - de se marier en toute légalité.
Faute de loi et malgré le principe du respect de la vie privée, la Cour de cassation a imposé des conditions discriminatoires en soumettant tout changement d'état civil à "un traitement médico-chirurgical, subi dans un but thérapeutique" pour qui "ne possède plus tous les caractères de son sexe d'origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l'autre sexe auquel correspond son comportement social". Si la conclusion (apparence, comportement) est plus ou moins de bon sens, les conditions initiales enferment le changement d'état civil dans l'enfer de la pathologisation judiciaire.
Si, comme les transgenres de Nancy et d'ailleurs, on réclame, au nom de la liberté de vivre son genre, un changement d'état civil conforme aux textes européens de 2009 et 2010, les tribunaux opposent des exigences variables : castration, certificat psychiatrique attestant de troubles, déshabillage intégral avec intromission forcée d'un doigt dans le néovagin, prothèses mammaires pour augmenter un 95 B (on découvre ainsi les goûts des procureurs...). Le ridicule ne cache pas la réalité d'humiliations inouïes et destructrices de la personne.
A l'initiative de la première association transgenre française, Trans Aide, avec le soutien de la Fédération des associations et centres lesbiens, gays, bi et trans (LGBT) et du cabinet de Me Emmanuel Pierrat, j'ai engagé une procédure pour un changement d'état civil sans condition, conformément aux recommandations du Conseil de l'Europe. En refusant de donner aux tribunaux la moindre justification médicale, j'ai placé les magistrats et, au-delà, le gouvernement, qui refuse de légiférer, devant leurs responsabilités.
Le 29 avril 2010, le Conseil de l'Europe a en effet adopté la résolution 1728 dont l'alinéa 16.11.2 demande aux Etats de garantir le droit des personnes transgenres à obtenir "des documents officiels reflétant l'identité de genre choisie, sans obligation préalable de subir une stérilisation ou d'autres procédures médicales comme une opération de conversion sexuelle ou une thérapie hormonale". Pour le ministre de la justice, Michel Mercier, il n'en est pas question : un changement d'état civil nécessite selon lui la preuve - avec des "attestations de médecins" - que le traitement hormonal a des effets "irréversibles, notamment (sur) la fécondité".
Non stérilisée, une femme transgenre pourrait concevoir un enfant qui serait l'enfant biologique de deux femmes. Nous pouvons maîtriser notre fécondité, de façon naturelle (90 % des personnes transgenres ne souhaitent pas être opérées) ou par procréation médicalement assistée, et nous imposerions alors la reconnaissance de l'autorité parentale conjointe de deux femmes. En me déboutant, le tribunal de grande instance de Nancy a dit dans ses attendus que cela mènerait à une situation qui a vu, aux Etats-Unis, un homme transgenre enceint. En France, c'est interdit. La stérilisation est la dernière défense du pouvoir contre l'homoparentalité.
Vous doutez encore ? Lorsqu'un homme transgenre veut obtenir un état civil masculin, que croyez-vous que les tribunaux français exigent ? Pour changer légalement de sexe, un homme transgenre peut garder son vagin, mais il doit se faire retirer l'utérus et les ovaires... S'opposer à tout risque d'homoparentalité : voilà pourquoi le ministre de la justice s'est fait stérilisateur en chef !
J'ai fait le choix, personnel, de modifier mon corps, et même d'être opérée, mais je refuse d'en rendre compte à l'Etat et de céder à ses exigences indignes. Le procureur s'est donc opposé à mon changement d'état civil, m'imposant de rester légalement de sexe masculin... Et j'ai pu épouser ma compagne ! La logique étatique n'a donc rien à voir avec le corps réel, ni avec le genre vécu. Quand voisins, commerçants, collègues, nous acceptent, le maintien d'un état civil masculin par l'Etat n'a qu'un but : nous créer des difficultés au quotidien pour nous faire payer un choix que personne ne nous conteste dans la vie réelle.
Thomas Hammerberg, commissaire européen aux droits de l'homme, a pourtant rappelé en octobre 2009, dans un document exemplaire intitulé "Droits de l'homme et identité de genre", que "Les Etats membres du Conseil de l'Europe devraient s'attaquer plus vigoureusement à la transphobie et à la discrimination envers les personnes transgenres, dont la situation a été longtemps ignorée et négligée. Pourtant, ces personnes font face à des problèmes caractéristiques, très concrets." Il estime que "les personnes qui souhaitent faire reconnaître leur identité de genre ne devraient pas obligatoirement être soumises à une stérilisation, ni à aucun autre traitement médical".
Martine Aubry, Cécile Duflot ou Marie-George Buffet, Jean-Luc Mélenchon ou Jean-Louis Borloo ne se sont pas (encore ?) prononcés pour l'application de la résolution 1728 du Conseil de l'Europe. Ces dirigeants, qui se réclament tous de la République et de la laïcité, se grandiraient en le faisant. Des milliers de transgenres pourraient ainsi espérer sortir d'une scandaleuse situation de non-droit. Car nous sommes des sortes de "sans-papiers" dans notre propre pays, sans parler de dizaines de milliers de personnes qui diffèrent leur transition par peur de la discrimination d'Etat, ou d'un divorce imposé à un couple uni qui ne le souhaite en rien. Oui, le gouvernement va jusque-là !
Les personnes transgenres, elles, veulent surtout vivre en citoyennes et citoyens à part entière. Au nom de trois mots que tant d'élites - à gauche comme à droite - oublient ou bafouent : Liberté, Egalité, Fraternité.
Mirabelle- Messages : 460
Date d'inscription : 25/10/2010
Re: En finir avec la transphobie
Je n'ai qu'un mot à dire :
Bravo
Kiss Mesdames diverses mais heureuse d'être.
Bravo
Kiss Mesdames diverses mais heureuse d'être.
Annabelle46- Messages : 2335
Date d'inscription : 28/10/2010
Age : 77
Localisation : Département du lot
Re: En finir avec la transphobie
Merçi Mirabelle,
La France est souvent a la pointe...De la bêtise !
Hier nous étions encore des dérangés psychiatriques.
Dieu merçi le texte initial interdisant de masquer le visage dans les lieux publics qui comportait une mention sur les tenues vestimentaires portant a confusion, a été largement amendé. Car la encore nous serions devenues délinquantes.
Les militaires ont l'esprit plus ouvert que les politiques et les magistrats, si j'en crois l'épopée de Delphine Ravise-Giard, qui avait "touché" ses effets féminins et les a porté quelques temps, avant de se les voir interdire par un mec en robe appellé magistrat
Juges...de Robe (et de Cour), ou ecclésiastiques se drapent dans la dignité de leur uniforme, ou plutôt dans la sclérose de leurs prétendue morale antédiluvienne.
Sans oublier les médicaux qui, lorsqu'un sexe est indéfinissable a la naissance, jouent de la chimie et/ou du bistouri, pour mettre en conformité un certificat de naissance.
En dépit de la gravité du sujet, j'ironiserai en disant que le peu de courage de certaines castes dites "bien pensantes" donne tout son sens au qualificatif de femmelettes. Mais ne devrais-je pas plutôt parler d'anorexie mentale.
Que vont-ils inventer pour que ce type de mariage ne soit plus possible ?????
Merçi encore, Mirabelle, pour la transmission de cet article.
Bisous de Céline
La France est souvent a la pointe...De la bêtise !
Hier nous étions encore des dérangés psychiatriques.
Dieu merçi le texte initial interdisant de masquer le visage dans les lieux publics qui comportait une mention sur les tenues vestimentaires portant a confusion, a été largement amendé. Car la encore nous serions devenues délinquantes.
Les militaires ont l'esprit plus ouvert que les politiques et les magistrats, si j'en crois l'épopée de Delphine Ravise-Giard, qui avait "touché" ses effets féminins et les a porté quelques temps, avant de se les voir interdire par un mec en robe appellé magistrat
Juges...de Robe (et de Cour), ou ecclésiastiques se drapent dans la dignité de leur uniforme, ou plutôt dans la sclérose de leurs prétendue morale antédiluvienne.
Sans oublier les médicaux qui, lorsqu'un sexe est indéfinissable a la naissance, jouent de la chimie et/ou du bistouri, pour mettre en conformité un certificat de naissance.
En dépit de la gravité du sujet, j'ironiserai en disant que le peu de courage de certaines castes dites "bien pensantes" donne tout son sens au qualificatif de femmelettes. Mais ne devrais-je pas plutôt parler d'anorexie mentale.
Que vont-ils inventer pour que ce type de mariage ne soit plus possible ?????
Merçi encore, Mirabelle, pour la transmission de cet article.
Bisous de Céline
Re: En finir avec la transphobie
Il est super ce texte.
Vous avez vu que les manuels scolaires vont désormais évoquer le "genre"... Les choses avancent.
J’écoute les réactions autour de moi, sur ce sujet. Une partie non négligeable des gens en sont encore au moyen age, c’est effrayant... :roll:
Leurs gosses vont avoir du travail pour leur expliquer ça lol
Morgane- Messages : 4589
Date d'inscription : 31/10/2010
Localisation : Centre-Val de Loire
Re: En finir avec la transphobie
Avalon a écrit:
Il est super ce texte.
Vous avez vu que les manuels scolaires vont désormais évoquer le "genre"... Les choses avancent.
J’écoute les réactions autour de moi, sur ce sujet. Une partie non négligeable des gens en sont encore au moyen age, c’est effrayant... :roll:
Leurs gosses vont avoir du travail pour leur expliquer ça lol
il n'y a qu'à lire les commentaires à la suite de cet article du Monde pour se rendre compte des résistances de tous ordres chez des gens cultivés, informés, qui écrivent et apparemment raisonnent bien (les abonnés au Monde) : sur le sujet, ils mélangent tout, la biologie, les pathologies, le droit, les religions, et même la "logique", et n'acceptent pas de poser la question simplement : de quel genre les personnes en questions veulent être reconnues?
c'est pourtant enfantin, même les enfants font comme ça : je serais une fille et toi tu serais un garçon, c'est accepté sans se demander pourquoi ni comment...
en effet il y aura beaucoup à apprendre des enfants!
katiagironde- Messages : 415
Date d'inscription : 27/10/2010
Age : 66
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