(D)ébats de Chantal
5 participants
Page 1 sur 1
(D)ébats de Chantal
Je traite ici des questions soulevées par Chantal dans "la loge de la concierge" à propos de votre humble (hum...) servante mais qui, je pense, peuvent intéresser tout le monde.
La première question était:
D'abord, l'abbé de Choisy, c'est un personnage extrêmement particulier. Même s'il existe des copines qui ont été élevées en fille (et j'en ai connu personnellement une, décédée voici quelques années), elles sont rares et aucune n'a vécu les aventures de toutes sortes arrivées à ce personnage. Je doute donc qu'on puisse en inférer vraiment quoi que ce soit. Cependant la question reste ouverte pour nous toutes: la transidentité influence-t'elle les activités érotiques ?
J'aurais tendance à penser que ce n'est le cas que pour les hommes non-transidentitaires, justement: cela peut être pour eux un fantasme ou un facteur excitant, soit de coucher avec une fille T, soit pour eux de se déguiser en femme (et je dis bien déguiser puisque cela n'emporte pas pour eux la moindre question d'identité: c'est juste une projection, généralement à base d'un discret masochisme, de leur vision de la féminité. Pour les femmes génétiques, qui sont à mon avis, comme les enfants selon Freund, des perverses polymorphes, je ne pense pas que coucher avec une fille T ou un garçon T signifie grand chose, pas plus qu'avec une autre fille en tout cas.
Et pour nous ? Ce que je vais dire ici est pure spéculation de ma part, étant donnée mon aversion, que Chantal a bien décelée, pour ce domaine et que je m'avance donc en terra incognita à propos de laquelle vous êtes libres de réagir. Je ne crois personnellement pas qu'il intervienne chez une fille T plus de fantasme qu'il n'en existe chez les non-T, et que s'il y en a ils n'ont rien à voir avec la transidentité puisque justement l'idéal d'une fille T est en général d'être considérée comme une femme non-T.
La deuxième question de Chantal est double, voire ambivalente, sinon contradictoire et plus complexe.
Cela va d'ailleurs, comme je l'avais annoncé, m'amener à parler de moi dans un contexte peu plaisant et encore douloureux. Mais d'abord quelques généralités.
On admet en principe que l'éducation a toujours un effet: soit elle façonne directement soit, par réaction, elle modèle à l'inverse de ses intentions, de telle sorte qu'on pourrait évacuer le débat, sauf à considérer que notre personnalité est innée ou, comme Chantal nous y invite, que nous avons latitude de nous en forger une au cours de l'existence. Cette phrase, mon amie: "comme si chacun(e) n'avait pas la possibilité de développer sa propre personnalité au fil du temps", je l'ai vraiment trouvée fort cruelle; car non, en admettant que cela soit possible, chacune n'a pas cette possibilité.
En dehors des cas de dédoublements de personnalité, il est possible que la personnalité unique change, là n'est pas la question: on trouve des exemples de tels cas dans les archives médicales, et il s'agit en général de phénomènes dûs à des maladies, voire des atteintes cérébrales. Beaucoup plus rarement, certaines personnes ont été, il est vrai, capables de changer complètement de personnalité (par exemple dans le milieu de l'espionnage ou pour échapper à la police, tel Louis Jouvet souteneur d'Arletty dans "Hotel du Nord"), souvent au détriment de leur équilibre psychologique. D'ailleurs les comédiens le font tout le temps, mais sur une trame imposée et pour peu de temps à chaque fois, bien que certains y ont, là encore, laissé leur santé mentale, comme Bela Lugosi.
Mais changer de personnalité en retrouvant une personnalité innée ou en s'en forgeant une de toutes pièces ? Et je ne parle pas ici de la personnalité féminine réduite que nous montrons toutes les unes aux autres sur des sites comme celui-ci ou lors de réunions ponctuelles, qui n'est, qu'on le veuille ou non, qu'une sorte d'aperçu parfois modelé sur des conventions sociétales archétypiques; c'est la question du "vrai moi" dont nous parlons souvent mais que nous ne pouvons sérieusement approcher, dans une démarche asymptotique, qu'avec notre intuition préalablement débarrassée de ces conventions (avec lesquelles il peut, quelle ironie, se trouver en conflit de telle sorte que notre "crédibilité" en soit ruinée) ainsi que de tout le carcan éducationnel imposé ou réactif.
Mais ceci n'est pas à la portée, par exemple, de celles qui, comme moi, ont vécu un enfer éducatif. J'ai été une enfant maltraitée; maltraitée psychologiquement, pas battue, encore que je me suis ramassée, de la part de mon père, des raclées pas piquées des vers dont je me souviens encore, presque soixante ans après. Non, mes parents ne connaissaient comme méthode d'éducation, ou plutôt de dressage, que la bonne vieille humiliation, mise à toutes les sauces. Rien de ce que je faisais ou de ce que j'étais ne les satisfaisait dans aucun domaine et leurs paroles blessantes résonnent encore à mes oreilles. J'ai passé d'innombrables et interminables nuits presque entièrement blanches à écouter, de la part de ma mère, la litanie de ses reproches, cérémonie régulière pour laquelle elle me réveillait exprès et après lesquelles elle m'obligeait à manger une orange sous prétexte que cela me ferait dormir... Qui plus est, mes parents semblaient pris du désir forcené de "me réparer": semelles orthopédiques, lunettes, gymnastique corrective, pour le physique, cours de rattrapages pour l'esprit, etc... rien ne m'a été épargné pour me faire sentir combien j'étais défectueuse.
Je me demande aujourd'hui si "ma particularité" n'est pas née inconsciemment du besoin impérieux d'être quelqu'un d'autre, aux antipodes de l'enfant que j'étais (donc: une fille) avec le tragique que cela donnait finalement raison aux parents sur l'inanité de l'être de leur fils, et cela d'autant plus que ma mère aurait voulu une fille, comme je le sus plus tard. Donc dès le début, ou presque, j'étais prise dans un dilemme schizophrène d'être et de mécontenter, ou de contenter et d'être autre en secret, sans que je puisse finalement distinguer ou identifier le "moi réel" pour autant qu'il pût exister. Tout au plus la seconde solution me permettait au moins de résister à la pression infernale de mes parents. La conséquence la plus notable, qui résulte autant de cette double identité à la moitié secrète que des violences mentales auxquelles je fus exposée, fut de faire de moi un être du secret, inapte à communiquer et échanger avec les autres, sur fond de méfiance pathologique. Aujourd'hui encore, bien que cela se soit amélioré, je ne sais pas me conduire en société et les relations sociales sont pour moi source de malaise, voire d'angoisse.
Mais ce n'est pas la seule conséquence: par exemple, comme on ne peut pas faire grandir un être virtuel, et pour atteindre enfin le coeur de la question, je suis mentalement restée une gamine égarée dans l'étrange monde des adultes. Chantal faisait allusion à "une sexualité hétéro paisible"; c'est quelque chose que je n'ai pas connu et qui reste un mystère alliant ennui et répugnance d'où, en effet Chantal, toute notion de plaisir est non seulement bannie mais incompréhensible; j'ai dû dire quelque part que c'était pour moi "la plus répugnante façon de s'emm..." et je ne le renierai jamais. J'ai eu trois enfants certes, car c'était une sorte de mission de vie à accomplir, mais vous n'imaginez pas (enfin, maintenant si, je pense que vous l'imaginez un peu) à quel prix. J'insiste sur le fait que, tenue à l'écart de la religion catholique comme d'ailleurs des autres, mes parents étant athées, la notion de "péché" de celle-ci, ainsi que divers autres de ses dogmes, m'est restée étrangère et n'a joué aucun rôle dans cette bizarre disposition...
On sort difficilement de la maltraitance: une fois qu'elle vous a marquée on y replonge facilement tant c'est un mode de vie qui vous est devenu habituel: quand on est enfant, on ignore que ce n'est pas normal: tout ce qui arrive vous paraît non pas normal, puisqu'on n'a pas la capacité d'en juger, mais naturel, de telle sorte qu'il n'y a pas de rébellion possible, surtout que l'enfant aime ses parents, n'ayant qu'eux au monde; et ensuite bien qu'elle vous rende malade à crever, elle agit comme un aimant inconscient qui vous attire dans les pires situations: ainsi moi qui n'aurais jamais dû me marier, j'ai trouvé mon bourreau avec une grande sûreté, une femme mentalement instable qui m'a fait revivre les pires heures de mon enfance et a rogné le peu d'ailes que j'avais réussi à faire pousser.
Dans tout ceci, je n'ai parlé que de l'éducation en général, pas de "l'éducation à être un garçon" qui était formulée dans la question; c'est que je n'ai pas cru distinguer: bien entendu, j'ai eu droit à des remarques stigmatisant la manque de "virilité" qui se faisait jour à travers mes goûts ou mon comportement, mais là mes parents n'étaient plus les seuls acteurs, relayés qu'ils étaient par des membres de la famille, voire de parfaits étrangers; cela ne relevait plus de l'éducation familiale mais de l'école de la vie au sens large. Ces remarques ne suscitaient guère de réaction de ma part: au fond je savais très bien que même avec la meilleure volonté du monde, je ne pourrais jamais faire partie de ces héros militaires ou sportifs, ces cow-boys exemplaires, ces trompe-la-mort, ces grands buveurs et surtout ces dragueurs impénitents que la société donnait volontiers comme des exemples masculins. Mais il en allait de même pour les élégants distingués à la Cary Grant. Je le savais et tout le monde le savait aussi, inconsciemment, surtout les filles, de sorte que je n'ai jamais intéressé personne (à part évidemment mon épouse qui trouvait là "le" partenaire idéal convenant à sa névrose).
D'un autre côté, j'ai côtoyé suffisamment de copines pour savoir que très souvent elles se sont livrées à des activités hyper-viriles (généralement hyper-stupides...) pour tenter d'échapper à "la malédiction" de leur condition et donner le change qu'on attendait d'elles...
Alors en somme, pour répondre enfin à la question, je dirais que oui, l'éducation à être un garçon peut avoir une répercussion sur l'un des aspects de notre comportement féminin, à savoir la sexualité, mais que cela dépend des personnes: toujours sur le principe "action=>réaction", certaines comme moi vont totalement l'occulter; d'autres vont s'y hyper-conformer et d'autres encore comme Chantal n'en seront pratiquement pas affectées. Tout ceci bien entendu manque cruellement de références scientifiques, mais la seule qui conviendrait peut-être serait le mot de Cocteau que j'ai connu trop tard (le mot, pas Cocteau) pour en tirer profit: "Ce qu'on te reproche, cultive-le: c'est toi!"
La première question était:
Chantal a écrit:
Tu évoquais toi-même la vie de l'Abbé de Choisy, dont la transidentité était accompagnée d'intenses activités érotiques...La question intéressante était de savoir dans quelle mesure l'une influençait les autres ; en les suractivant ou pas ?
Cela , c'est une question générale pour un débat possible.
D'abord, l'abbé de Choisy, c'est un personnage extrêmement particulier. Même s'il existe des copines qui ont été élevées en fille (et j'en ai connu personnellement une, décédée voici quelques années), elles sont rares et aucune n'a vécu les aventures de toutes sortes arrivées à ce personnage. Je doute donc qu'on puisse en inférer vraiment quoi que ce soit. Cependant la question reste ouverte pour nous toutes: la transidentité influence-t'elle les activités érotiques ?
J'aurais tendance à penser que ce n'est le cas que pour les hommes non-transidentitaires, justement: cela peut être pour eux un fantasme ou un facteur excitant, soit de coucher avec une fille T, soit pour eux de se déguiser en femme (et je dis bien déguiser puisque cela n'emporte pas pour eux la moindre question d'identité: c'est juste une projection, généralement à base d'un discret masochisme, de leur vision de la féminité. Pour les femmes génétiques, qui sont à mon avis, comme les enfants selon Freund, des perverses polymorphes, je ne pense pas que coucher avec une fille T ou un garçon T signifie grand chose, pas plus qu'avec une autre fille en tout cas.
Et pour nous ? Ce que je vais dire ici est pure spéculation de ma part, étant donnée mon aversion, que Chantal a bien décelée, pour ce domaine et que je m'avance donc en terra incognita à propos de laquelle vous êtes libres de réagir. Je ne crois personnellement pas qu'il intervienne chez une fille T plus de fantasme qu'il n'en existe chez les non-T, et que s'il y en a ils n'ont rien à voir avec la transidentité puisque justement l'idéal d'une fille T est en général d'être considérée comme une femme non-T.
La deuxième question de Chantal est double, voire ambivalente, sinon contradictoire et plus complexe.
Chantal a écrit:
Là où il y a sujet à débat , c'est de discerner à quel point l'éducation à être un garçon (ce qui a été le cas de tout le monde ici, sauf pour Loan, je crois) à eu une répercussion sur l'un des aspects de votre comportement féminin, à savoir votre sexualité.[...] Je pense enfin que l'éducation a parfois bon dos ; on ne saurait se plaindre sur le mode "c'est la faute à mon éducation", comme si chacun(e) n'avait pas la possibilité de développer sa propre personnalité au fil du temps
Cela va d'ailleurs, comme je l'avais annoncé, m'amener à parler de moi dans un contexte peu plaisant et encore douloureux. Mais d'abord quelques généralités.
On admet en principe que l'éducation a toujours un effet: soit elle façonne directement soit, par réaction, elle modèle à l'inverse de ses intentions, de telle sorte qu'on pourrait évacuer le débat, sauf à considérer que notre personnalité est innée ou, comme Chantal nous y invite, que nous avons latitude de nous en forger une au cours de l'existence. Cette phrase, mon amie: "comme si chacun(e) n'avait pas la possibilité de développer sa propre personnalité au fil du temps", je l'ai vraiment trouvée fort cruelle; car non, en admettant que cela soit possible, chacune n'a pas cette possibilité.
En dehors des cas de dédoublements de personnalité, il est possible que la personnalité unique change, là n'est pas la question: on trouve des exemples de tels cas dans les archives médicales, et il s'agit en général de phénomènes dûs à des maladies, voire des atteintes cérébrales. Beaucoup plus rarement, certaines personnes ont été, il est vrai, capables de changer complètement de personnalité (par exemple dans le milieu de l'espionnage ou pour échapper à la police, tel Louis Jouvet souteneur d'Arletty dans "Hotel du Nord"), souvent au détriment de leur équilibre psychologique. D'ailleurs les comédiens le font tout le temps, mais sur une trame imposée et pour peu de temps à chaque fois, bien que certains y ont, là encore, laissé leur santé mentale, comme Bela Lugosi.
Mais changer de personnalité en retrouvant une personnalité innée ou en s'en forgeant une de toutes pièces ? Et je ne parle pas ici de la personnalité féminine réduite que nous montrons toutes les unes aux autres sur des sites comme celui-ci ou lors de réunions ponctuelles, qui n'est, qu'on le veuille ou non, qu'une sorte d'aperçu parfois modelé sur des conventions sociétales archétypiques; c'est la question du "vrai moi" dont nous parlons souvent mais que nous ne pouvons sérieusement approcher, dans une démarche asymptotique, qu'avec notre intuition préalablement débarrassée de ces conventions (avec lesquelles il peut, quelle ironie, se trouver en conflit de telle sorte que notre "crédibilité" en soit ruinée) ainsi que de tout le carcan éducationnel imposé ou réactif.
Mais ceci n'est pas à la portée, par exemple, de celles qui, comme moi, ont vécu un enfer éducatif. J'ai été une enfant maltraitée; maltraitée psychologiquement, pas battue, encore que je me suis ramassée, de la part de mon père, des raclées pas piquées des vers dont je me souviens encore, presque soixante ans après. Non, mes parents ne connaissaient comme méthode d'éducation, ou plutôt de dressage, que la bonne vieille humiliation, mise à toutes les sauces. Rien de ce que je faisais ou de ce que j'étais ne les satisfaisait dans aucun domaine et leurs paroles blessantes résonnent encore à mes oreilles. J'ai passé d'innombrables et interminables nuits presque entièrement blanches à écouter, de la part de ma mère, la litanie de ses reproches, cérémonie régulière pour laquelle elle me réveillait exprès et après lesquelles elle m'obligeait à manger une orange sous prétexte que cela me ferait dormir... Qui plus est, mes parents semblaient pris du désir forcené de "me réparer": semelles orthopédiques, lunettes, gymnastique corrective, pour le physique, cours de rattrapages pour l'esprit, etc... rien ne m'a été épargné pour me faire sentir combien j'étais défectueuse.
Je me demande aujourd'hui si "ma particularité" n'est pas née inconsciemment du besoin impérieux d'être quelqu'un d'autre, aux antipodes de l'enfant que j'étais (donc: une fille) avec le tragique que cela donnait finalement raison aux parents sur l'inanité de l'être de leur fils, et cela d'autant plus que ma mère aurait voulu une fille, comme je le sus plus tard. Donc dès le début, ou presque, j'étais prise dans un dilemme schizophrène d'être et de mécontenter, ou de contenter et d'être autre en secret, sans que je puisse finalement distinguer ou identifier le "moi réel" pour autant qu'il pût exister. Tout au plus la seconde solution me permettait au moins de résister à la pression infernale de mes parents. La conséquence la plus notable, qui résulte autant de cette double identité à la moitié secrète que des violences mentales auxquelles je fus exposée, fut de faire de moi un être du secret, inapte à communiquer et échanger avec les autres, sur fond de méfiance pathologique. Aujourd'hui encore, bien que cela se soit amélioré, je ne sais pas me conduire en société et les relations sociales sont pour moi source de malaise, voire d'angoisse.
Mais ce n'est pas la seule conséquence: par exemple, comme on ne peut pas faire grandir un être virtuel, et pour atteindre enfin le coeur de la question, je suis mentalement restée une gamine égarée dans l'étrange monde des adultes. Chantal faisait allusion à "une sexualité hétéro paisible"; c'est quelque chose que je n'ai pas connu et qui reste un mystère alliant ennui et répugnance d'où, en effet Chantal, toute notion de plaisir est non seulement bannie mais incompréhensible; j'ai dû dire quelque part que c'était pour moi "la plus répugnante façon de s'emm..." et je ne le renierai jamais. J'ai eu trois enfants certes, car c'était une sorte de mission de vie à accomplir, mais vous n'imaginez pas (enfin, maintenant si, je pense que vous l'imaginez un peu) à quel prix. J'insiste sur le fait que, tenue à l'écart de la religion catholique comme d'ailleurs des autres, mes parents étant athées, la notion de "péché" de celle-ci, ainsi que divers autres de ses dogmes, m'est restée étrangère et n'a joué aucun rôle dans cette bizarre disposition...
On sort difficilement de la maltraitance: une fois qu'elle vous a marquée on y replonge facilement tant c'est un mode de vie qui vous est devenu habituel: quand on est enfant, on ignore que ce n'est pas normal: tout ce qui arrive vous paraît non pas normal, puisqu'on n'a pas la capacité d'en juger, mais naturel, de telle sorte qu'il n'y a pas de rébellion possible, surtout que l'enfant aime ses parents, n'ayant qu'eux au monde; et ensuite bien qu'elle vous rende malade à crever, elle agit comme un aimant inconscient qui vous attire dans les pires situations: ainsi moi qui n'aurais jamais dû me marier, j'ai trouvé mon bourreau avec une grande sûreté, une femme mentalement instable qui m'a fait revivre les pires heures de mon enfance et a rogné le peu d'ailes que j'avais réussi à faire pousser.
Dans tout ceci, je n'ai parlé que de l'éducation en général, pas de "l'éducation à être un garçon" qui était formulée dans la question; c'est que je n'ai pas cru distinguer: bien entendu, j'ai eu droit à des remarques stigmatisant la manque de "virilité" qui se faisait jour à travers mes goûts ou mon comportement, mais là mes parents n'étaient plus les seuls acteurs, relayés qu'ils étaient par des membres de la famille, voire de parfaits étrangers; cela ne relevait plus de l'éducation familiale mais de l'école de la vie au sens large. Ces remarques ne suscitaient guère de réaction de ma part: au fond je savais très bien que même avec la meilleure volonté du monde, je ne pourrais jamais faire partie de ces héros militaires ou sportifs, ces cow-boys exemplaires, ces trompe-la-mort, ces grands buveurs et surtout ces dragueurs impénitents que la société donnait volontiers comme des exemples masculins. Mais il en allait de même pour les élégants distingués à la Cary Grant. Je le savais et tout le monde le savait aussi, inconsciemment, surtout les filles, de sorte que je n'ai jamais intéressé personne (à part évidemment mon épouse qui trouvait là "le" partenaire idéal convenant à sa névrose).
D'un autre côté, j'ai côtoyé suffisamment de copines pour savoir que très souvent elles se sont livrées à des activités hyper-viriles (généralement hyper-stupides...) pour tenter d'échapper à "la malédiction" de leur condition et donner le change qu'on attendait d'elles...
Alors en somme, pour répondre enfin à la question, je dirais que oui, l'éducation à être un garçon peut avoir une répercussion sur l'un des aspects de notre comportement féminin, à savoir la sexualité, mais que cela dépend des personnes: toujours sur le principe "action=>réaction", certaines comme moi vont totalement l'occulter; d'autres vont s'y hyper-conformer et d'autres encore comme Chantal n'en seront pratiquement pas affectées. Tout ceci bien entendu manque cruellement de références scientifiques, mais la seule qui conviendrait peut-être serait le mot de Cocteau que j'ai connu trop tard (le mot, pas Cocteau) pour en tirer profit: "Ce qu'on te reproche, cultive-le: c'est toi!"
Béatrice, galwenne, chantal92, Lilas Mauve, Lou, jennyfer et Lauren aiment ce message
Re: (D)ébats de Chantal
Merci de cette réponse, MA, qui joint une belle analyse générale à un exemple particulier, à savoir toi-même , et merci donc pour ta confiance à notre égard
Ton post mérite une réponse d'aussi belle facture, que je te donnerai sous peu, en essayant de faire en sorte qu'elle puisse intéresser beaucoup d'entre nous, comme points de repère permettant une réflexion sur soi-même du point de vue de notre particularité ; étant entendu que certaines peuvent très bien s'en passer("I am what I am..." point barre, comme disait Raymond) et donc ne pas s'embêter à nous lire;
Une seule remarque donc aujourd'hui, parce que cet aspect m'a réellement choquée : tu dis dans la même phrase "pas battue, encore que je me suis ramassé des raclées....". Durant toute ma jeunesse, je n'ai reçu qu'une seule gifle, dont je me souviens encore parce que mon père est venu s'excuser un quart d'heure après, et que, curieusement, autant j'étais furieux avant, autant après, quand il avait en quelque sorte rétabli ma dignité et l'égalité entre nous, je me suis dit que je l'avais peut-être bien méritée. La raclée, par contre, est inadmissible, et ta phrase, démarrée sur le mode de la négation, masquant donc la vérité, puis reconnaissant les faits, témoigne bien de la violence psychique qu'elle entraîne, si forte qu'on a envie de nier la réalité.
Ton post mérite une réponse d'aussi belle facture, que je te donnerai sous peu, en essayant de faire en sorte qu'elle puisse intéresser beaucoup d'entre nous, comme points de repère permettant une réflexion sur soi-même du point de vue de notre particularité ; étant entendu que certaines peuvent très bien s'en passer("I am what I am..." point barre, comme disait Raymond) et donc ne pas s'embêter à nous lire;
Une seule remarque donc aujourd'hui, parce que cet aspect m'a réellement choquée : tu dis dans la même phrase "pas battue, encore que je me suis ramassé des raclées....". Durant toute ma jeunesse, je n'ai reçu qu'une seule gifle, dont je me souviens encore parce que mon père est venu s'excuser un quart d'heure après, et que, curieusement, autant j'étais furieux avant, autant après, quand il avait en quelque sorte rétabli ma dignité et l'égalité entre nous, je me suis dit que je l'avais peut-être bien méritée. La raclée, par contre, est inadmissible, et ta phrase, démarrée sur le mode de la négation, masquant donc la vérité, puis reconnaissant les faits, témoigne bien de la violence psychique qu'elle entraîne, si forte qu'on a envie de nier la réalité.
chantal92- Messages : 4613
Date d'inscription : 11/05/2015
Age : 75
Localisation : présente sur la carte
Béatrice, Michele-Anne, galwenne, Annabelle46, Lou et Lauren aiment ce message
Re: (D)ébats de Chantal
OUPS !!! ,je vais devoir entrainer mes neurones ....ou faire appel à une Amie (très proche ....) qui "suis" , parfois, les échanges de ce forum d'une grande richesse (le forum ...pas mon"amie" !! Lol ) .chantal92 a écrit:
que je te donnerai sous peu, en essayant de faire en sorte qu'elle puisse intéresser beaucoup d'entre nous,
Très émouvant Michèle -Anne ce que tu partages avec nous, je vois derrière ce drame une personne fragilisée mais qui a développé un bel élan de vie ; merci pour ce témoignage qui va en appeler d'autres ?
Personnellement les quelques raclées reçues (uniquement par une main féminine ...coucou Sacher ...), avec le recul, me paraissent moins traumatisantes que le fait d 'avoir "écraser" (par manque de détermination , de courage ?? je l'ignore ...) , une personnalité : innée ?? , ou réactive ?? , je ne peu le savoir . Seulement une défiance à l’égard du groupe, mais qui dans mon cas a pris une tournure moins dans la défiance et la crainte de " l'autre " que ce que tu as " bâti" pour tenir . La rencontre d'un être Aimée, (oui je sais l'Amuurrrr n'est qu'une réaction chimique de nos hormones .....je reste malgré tout une rêveuse dans ce domaine ) , m'a fait "oublié" (partiellement , comme nombres d’entre nous... ) durant des années ce malaise existentiel qui et revenu en force passé la cinquantaine ...L'andropause ??? peut être ?? encore ces "foutues " Hormones !!
Lou- Messages : 4220
Date d'inscription : 22/11/2019
Age : 65
Localisation : Chalon sur Saone
galwenne, Lilas Mauve et Lauren aiment ce message
Re: (D)ébats de Chantal
Merci de votre soutien les amies...
Chantal, je voulais seulement dire que comparée à celles qui ont été corrigées à coups de ceinture ou précipitées dans les escaliers (entre autres) j'avais du mal à me considérer comme battue...
Chantal, je voulais seulement dire que comparée à celles qui ont été corrigées à coups de ceinture ou précipitées dans les escaliers (entre autres) j'avais du mal à me considérer comme battue...
Béatrice, galwenne, chantal92 et Lauren aiment ce message
Re: (D)ébats de Chantal
Michele-Anne a écrit:Merci de votre soutien les amies...
Chantal, je voulais seulement dire que comparée à celles qui ont été corrigées à coups de ceinture ou précipitées dans les escaliers (entre autres) j'avais du mal à me considérer comme battue...
Pas faux ta réaction Michèle Anne, mais qu'importe la méthode de correction qu'elle soit forte ou légère physique ou mentale, elle reste de la violence..
Je suis personnellement issue d'un milieu ou la correction physique était monnaie courante au regard du nombre d'enfants à gérer.. Ce qu'il me reste à l'esprit (j'ai connue le ceinturon de cuir) est avant tout une douleur humiliante et un sentiment de révolte lorsque bien souvent comme je ne me défendais pas) je recevais la punition en lieu et place de mes frères.
étais ce la différence de tempérament et de physique qui faisaient de moi cette victime déclarée ???
chantal92 et Lauren aiment ce message
Re: (D)ébats de Chantal
Chère MA,
Ton enfance n'a pas été très simple avec ces quelques raclées ou humiliations. J'ai la chance, sans doute, d'être née dans un environnement plus serein. Mon enfance a été surtout au milieu de filles et je ne sais pas si mon éducation a été d'être un garçon.
Alors comme ne l'a pas dit Cocteau, ce que l'on ne m'a pas reproché, je l'ai cultivé (dans ma tête surtout) quand même et enfin un jour de 2015 je suis devenue "Moi".
Mon éducation de garçon au milieu de filles, puis ma vie à l'école jusqu'à l'université toujours entouré essentiellement de filles a eu comme répercution que je n'était pas vraiment viril et pour tout dire franchement efféminé. Quant à ma sexualité, je regardais les garçons et comme j'ai dû l'écrire dans "mon histoire" mon premier amour et mon premier chagrin était pour un garçon.
Je suis sans doute le mauvais exemple puisque il ne me semble pas que mon éducation de "garçon" n'a pas eu de répercution sur mon comportement féminin.
L’exception : Je me suis marié et ma virilité s'est révélée avec amour et ponctuellement pour la procréation de deux enfants que j'adore. Une page de ma vie dans la "normalité" mais avec beaucoup de tourments mentaux.
Ton enfance n'a pas été très simple avec ces quelques raclées ou humiliations. J'ai la chance, sans doute, d'être née dans un environnement plus serein. Mon enfance a été surtout au milieu de filles et je ne sais pas si mon éducation a été d'être un garçon.
Alors comme ne l'a pas dit Cocteau, ce que l'on ne m'a pas reproché, je l'ai cultivé (dans ma tête surtout) quand même et enfin un jour de 2015 je suis devenue "Moi".
Mon éducation de garçon au milieu de filles, puis ma vie à l'école jusqu'à l'université toujours entouré essentiellement de filles a eu comme répercution que je n'était pas vraiment viril et pour tout dire franchement efféminé. Quant à ma sexualité, je regardais les garçons et comme j'ai dû l'écrire dans "mon histoire" mon premier amour et mon premier chagrin était pour un garçon.
Je suis sans doute le mauvais exemple puisque il ne me semble pas que mon éducation de "garçon" n'a pas eu de répercution sur mon comportement féminin.
L’exception : Je me suis marié et ma virilité s'est révélée avec amour et ponctuellement pour la procréation de deux enfants que j'adore. Une page de ma vie dans la "normalité" mais avec beaucoup de tourments mentaux.
Nicole- Messages : 946
Date d'inscription : 20/01/2023
Age : 73
Localisation : Isère - à 35 kms de Lyon
galwenne, chantal92 et Lauren aiment ce message
Re: (D)ébats de Chantal
galwenne a écrit:Michele-Anne a écrit:Merci de votre soutien les amies...
Chantal, je voulais seulement dire que comparée à celles qui ont été corrigées à coups de ceinture ou précipitées dans les escaliers (entre autres) j'avais du mal à me considérer comme battue...
Pas faux ta réaction Michèle Anne, mais qu'importe la méthode de correction qu'elle soit forte ou légère physique ou mentale, elle reste de la violence..
Je suis personnellement issue d'un milieu ou la correction physique était monnaie courante au regard du nombre d'enfants à gérer.. Ce qu'il me reste à l'esprit (j'ai connue le ceinturon de cuir) est avant tout une douleur humiliante et un sentiment de révolte lorsque bien souvent comme je ne me défendais pas) je recevais la punition en lieu et place de mes frères.
étais ce la différence de tempérament et de physique qui faisaient de moi cette victime déclarée ???
Oui bien sûr Galwenne tu as raison ; c'est juste difficile de reconnaître une situation quand on est à l'intérieur, comme le souffle Chantal.
Concernant le reste, je crois qu'il ne faut pas raisonner en terme de victime mais en terme de bourreau car c'est lui qui de a à z construit cette situation et la concrétise. Ces gens là ont le chic, comme tout prédateur, de repérer non pas la victime mais la proie qu'ils pourront martyriser à loisir et sans risque.
Est-ce une faiblesse de notre part d'être choisies pour cela? Rien n'est moins sûr et en tout cas cela n'a rien à voir à mon avis avec le genre. D'abord nous ne connaissons pas la raison de ces violences, nous ne savons pas que c'en sont et nous ignorons comment lutter contre... Ce n'est qu'une fois adultes ou jeunes adultes que nous réalisons et qu'il ne nous reste plus qu'à faire face aux dégâts qu'elles ont causé et qui font partie de nous... Pour en tirer parti ce qui est plus productif que de nous interroger sur le "pourquoi moi" qui nous échappe, n'a pas lieu d'être et ne peut que nous enfermer mentalement dans une boucle infernale
galwenne, Annabelle46, chantal92 et Lauren aiment ce message
Re: (D)ébats de Chantal
Nicole a écrit:
Je suis sans doute le mauvais exemple puisque il ne me semble pas que mon éducation de "garçon" n'a pas eu de répercution sur mon comportement féminin.
Nicole, il n'y a pas de "mauvais exemples", mauvais parce qu'ils ne colleraient pas avec une théorie, il y a juste des exemples ( à partir desquels on peut envisager une théorie).
chantal92- Messages : 4613
Date d'inscription : 11/05/2015
Age : 75
Localisation : présente sur la carte
Michele-Anne, galwenne, Annabelle46 et Lauren aiment ce message
Sujets similaires
» le petit salon de thé pour dire bonjour en passant
» le petit salon de thé pour dire bonjour en passant
» album de Chantal
» Anniversaire Chantal
» anniversaire Chantal
» le petit salon de thé pour dire bonjour en passant
» album de Chantal
» Anniversaire Chantal
» anniversaire Chantal
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum