Désir d'enfant

Je viens partager avec vous un sentiment nouveau qui m'éprend : j'ai envie d'avoir un enfant.

Chose banale me diraient certaines d'entre-vous, qui ont déjà des enfants, voire même des petits-enfants !

Sauf que la paternité m'a toujours été étrangère et je n'ai jamais ressenti le besoin de me reproduire.

Et je n'avais jamais ressenti non plus, la moindre émotion maternelle.

Mais depuis quelque temps, je sens ce désir, très intensément en moi. Il est apparu la première fois, lors d'une relation intense avec mon amant. C'est comme si mon ventre criait qu'il voulait être enfanté, et depuis, parfois, dans la journée, ce feu intérieur se manifeste puissamment. Et je serai même capable, mon amant étant marié, d'élever seule mon enfant, alors que je n'ai jamais envisagé de devenir père.

Je sais que cela m'est impossible d'être fécondée, et que je ne sentirai jamais en moi mon enfant prendre sa vie. Il faut que j'apprenne à vivre avec ce manque, tout comme j'ai appris à ne pas avoir de cheveux épais, ni de seins à la place de ce torse plat qui me surprend encore par son aspect inabouti.

Peut-être que je délire, que c'est le mental qui conditionne mon corps mais je vous assure que je sens physiquement cet appel du ventre. Et cela me prend d'un seul coup, sans prévenir. Au bureau, ou comme ce soir, dans le métro et d'une manière si intense, que j'en ai presque les larmes aux yeux, car cela ne se concrétisera jamais. Alors je mets ma main sur le ventre, pour l'apaiser, comme un lent massage, une caresse appuyée.

Comme c'est la première fois que j'accepte de vivre une relation amoureuse suivie, mon amant m'a gentiment dit que ce désir d'enfant était la preuve que j'acceptais de plus en plus ma féminité, et que celle-ci, s'épanouissant avec moins de contraintes, évoluait normalement. D'adolescente fofolle, je deviens une femme mûre en quelque sorte.

Peut-être vivez-vous aussi une certaine maternité, d'une autre manière, car je ne pense pas être la seule à ressentir cela ?

Et comme tout ce qui touche ma vie (en discontinu) de femme, cela est dur à porter parfois en tant qu'homme social , mais j'en suis le plus souvent heureuse de connaître ces moments précieux, comme un cadeau des dieux.

Bises

Danièla

Coucou, Daniela,  tu n'avais pas un sujet plus facile ? . . . lol . . .
On voit de nombreuses lectures de ton post, mais ce n'est visiblement pas facile de se lancer à te répondre, j'ai cependant été assez émue en te lisant, suffisamment pour me jeter dans le bain . . .
Tout d'abord NON-NON ET NON ce n'est pas du délire, il me semble que ce que tu vis est assez naturel, tu viens de te lancer dans une relation amoureuse, c'est tout à ton honneur que de vouloir combler ton amant en lui faisant un cadeau qui est certainement parmi les plus beaux et les plus naturels, et celà n'a certainement rien à voir avec la transidentité . . .
Pour ma part je me suis interrogée, et si je n'ai jamais ressenti ce besoin, c'est certainement parce que j'ai passé l'âge de pouvoir procréer de façon "raisonnable" . . . si je m'étais lancée plus jeune je l'aurais certainement vécu moi aussi . .
Certaines auraient sans doute envie de te conseiller d'oublier cette idée, pour ma part ce ne sera pas du tout le cas, j'ai la certitude que cette envie montre simplement que tu as beaucoup d'amour à donner, continue à l'entretenir sous l'angle de la curiosité et de la découverte mais n'en fais surtout pas une fixation obsessionnelle, tu auras forcément un jour une réponse qui te comblera sous une forme ou sous une autre . . .
Et puis regarde autour de toi, il y a plus de bios infertiles qu'on pourrait le penser, elles ont droit d'être heureuses elles aussi . . .
ça fera 50 Euros pour la consultation . . . . . lol !
Mille baisers à toi,
Steph

lol oh mon dieu le sujet sulfureux au possible !
J'ai bien quelques idées mais... Ça vaudra ce que ça vaut hein..
Il me semble que les hormones jouent un rôle important chez les femmes cisgenres, dans cette sensation là ? Donc à défaut, je me dit que c'est de ce côté qu'on pourrait trouver une explication

Il est apparu la première fois, lors d'une relation intense avec mon amant. C'est comme si mon ventre criait qu'il voulait être enfanté, et depuis, parfois, dans la journée, ce feu intérieur se manifeste puissamment

Lorsque les conditions sont bonnes, on peut vivre une tempête dans la tête le cœur et.. Etc ^^ Je crois vraiment que ça réveille en nous un côté "femelle". À partir de là, tout est possible. Les larmes, l'abandon.. Pourquoi pas une envie d'avoir un enfant

...

C'est un sentiment qu'évoquait dans un reportage une jeune trans qui vivait une histoire d'amour avec un copain cisgenre , on peut penser que c'est quelque chose d' assez naturel finalement et peut être que les femmes trans pourront un jour bénéficier de la greffe d'utérus , on est un peu dans la science fiction , imaginer que des personnes nées hommes puissent un jour mettre des enfants au monde ce serait une révolution et aussi en matière d'égalité des sexes !

Michelle m a écrit:C'est un sentiment qu'évoquait dans un reportage une jeune trans qui vivait une histoire d'amour  avec un copain cisgenre , on peut penser que c'est quelque chose d' assez naturel finalement et peut être que les femmes trans pourront un jour bénéficier de la greffe d'utérus , on est un peu dans la science fiction , imaginer que des personnes nées hommes puissent un jour mettre des enfants au monde ce serait une révolution et aussi en matière d'égalité des sexes !

Bonsoir, c'est encore plus complexe le bassin d'un homme est différent de celui d'une femme qui est adapté à la mise au monde d'enfant ……tu le dis c'est de la science fiction ...

Merci les amies pour vos réponses.

Je m'excuse d'avoir publié un post si intime et je vous suis reconnaissante d'avoir pris le temps de donner votre point de vue sur le sujet.

Ce sentiment est si nouveau pour moi, que j'ai voulu savoir si j'étais la seule à le ressentir. Et je me demandais aussi s'il était une création de mon esprit ou une manifestation de mon corps.

De temps en temps, je sens au niveau du ventre une envie de porter un enfant, qui se transforme aussitôt en manque, pour se terminer en un sentiment de tristesse.

Cela va peut-être passer, ou je vais m'y habituer. Mais pas d'alerte, cela ne m'empêche pas de continuer à vivre.

Bises

Danièla

Je pense que ce post de Danièla n'est ni sulfureux, ni délirant et qu'il ne relève pas de la science-fiction.

1) Il faut rappeler que la majorité des femmes éprouve ce désir d'enfant.
On peut : soit estimer qu'il est d'origine purement génétique (la survie de l'espèce), soit qu'il est la résultante d'une construction sociale, soit que c'est un mélange des deux.
Si les deux dernières hypothèses sont exactes, une transgenre MtF , portant en elle une forte dose de féminité, qui va croissant parce qu'elle la laisse s'épanouir et la cultive, à la fois physiquement (hormones, par exemple) et psychiquement (choix d'une garde-robe, séances de coiffeuse, d'esthéticienne, sorties avec des amies, demande de changement d'état-civil, etc), va forcément éprouver peu à peu sur ce chemin de transition les sentiments et sensations qu'éprouve une femme. Je vous renvoie aux posts "Première fois" et aux émouvantes descriptions (de Claire en particulier), qui évoquent les jalons du parcours.

2) Parmi ces jalons, on trouvera aussi bien la découverte de la relation sociale en tant que femme que, autre possible, de la relation physique avec le genre d'en face, par exemple. Et donc pourquoi pas le désir d'enfant ? Lorsque le binôme transgenre / amant ne se réduit pas à un ébat amoureux mensuel, mais qu'il s'inscrit dans le cadre d'un véritable dialogue, de sorties usuelles aux couples, etc, la notion de "couple" se cristallise autour de ce que vivent généralement les couples, et avoir un enfant fait partie de ce vécu. Comme le dit Michelle, "c'est quelque chose d'assez naturel finalement".

3) Danièla n'a pas écrit "je veux avoir un enfant", comme on dirait "je veux m'acheter une voiture", elle évoque simplement un désir comme reflet d'un MANQUE. Parce qu'il manque à une transgenre des composantes physiques (j'ai connu une amie transgenre qui se désolait de ne pas avoir de règles....), elle en prend conscience et les traduit en désirs. Elle n'attendait visiblement pas de conseils en la matière (comme on donne des conseils pour l'entretien d'une perruque ou pour le maquillage ), mais souhaitait savoir si d'autres qu'elle éprouvaient cet affect. Question légitime vu la façon dont elle nous présente la chose, à savoir non un désir fantasmatique construit intellectuellement, mais comme une sensation physique et psychique qui vous tombe dessus.

4) Les choses n'existent que parce que nous les percevons et uniquement sous la forme où nous les percevons (par exemple, couleurs, saveurs, etc) et nos sensations ne sont nullement "objectives" et encore moins nos sentiments. Entre le "déni de maternité" et l'illusion d'être enceinte alors qu'on ne l'est pas, il y a une multitude de réactions face à la maternité. La réaction de Danièla, ce qu'elle éprouve dans le métro, est un exemple finalement banal de ce que ressentent beaucoup de femmes stériles.

5) Si l'on place le débat sur le champ de la seule possibilité concrète AUJOURD'HUI pour un homme d'être enceint, on est doublement à côté de la plaque. D'abord parce qu'il s'agit d'une question psychologique , c'est à dire que nous sommes à un niveau où le réel et ses possibles importent peu....et d'autre part parce que la science-fiction n'est que la réalité de demain vue d'aujourd'hui et jugée possible ou impossible suivant des critères très arbitraires. Et même si le sujet n'est pas là, je pense qu'il n'est pas exclu que dans 50 ans la chirurgie ait tellement évolué qu'il soit possible de transformer un homme en femme, y compris pour la reproduction....chose certainement limitée à quelques happy few, mais qui, je cite encore Michelle, va définitivement révolutionner les rapports égalité/inégalité entre les sexes !

Toutes mes excuses par avance à Danièla si elle juge mon commentaire à côté de la plaque lui aussi !

Je lis avec intérêt vos échanges. J'avoue en être légèrement perturbée sans vraiment me l'expliquer...
Daniela, une question : ton "désir d'enfant", c'est :

• ressentir l'envie d'être enceinte, de vivre une grossesse  et un accouchement?
  

Ou

• avoir envie d'être mère, d'élever ton propre enfant?
  

Bise

Sophie MAJORETTE a écrit:Je lis avec intérêt vos échanges. J'avoue en être légèrement perturbée sans vraiment me l'expliquer...
Daniela, une question : ton "désir d'enfant", c'est :

• ressentir l'envie d'être enceinte, de vivre une grossesse  et un accouchement?
  Ou
  
• avoir envie d'être mère, d'élever ton propre enfant?
  

Bise

Bonjour Sophie,

Mon envie "se limite" au désir d'être enceinte, de porter un enfant en moi, mais sans penser à l'accouchement. Et le désir d'être mère mais sans penser aux conséquences éducatives.

J'écris envie mais ce n'est pas le mot juste. C'est comme un besoin qui vient des profondeurs de mon ventre, que je ressens physiquement. Cela n'a jamais été un fantasme pour moi d'être enceinte, ni même un quelconque aboutissement d'évolution vers l'expression de ma féminité.

J'en suis la première surprise, d'autant plus que ce sentiment perdure, et remonte à la surface de temps en temps. Comme hier alors que je conduisais... Et une envie de pleurer monte en moi...

Cependant, je n'imagine pas un seul instant effectuer des démarches et recherches pour combler ce manque ! Ayant lu avec intérêt les explications possibles émises par Chantal, je crois qu'elle a vu juste. C'est la manifestation physique d'une évolution psychologique.

Et puis je n'ai plus l'âge d'être enceinte

Bises

Danièla

Il y a bien longtemps vers 26 ou 27 ans alors que je vivais seul (et pas seulE, parce que c'était avant ma transition) j'ai eu un désir d'enfant qui était étrange parce que déconnecté des notions de vie en couple, de relation sexuelle. Ce désir a disparu au bout de trois ou quatre ans (toujours vivant seule). Plus tard pendant le temps ou j'étais marié, c'est ma femme (trans opérée) qui voulut adopter un enfant. J'étais d'accord mais à ce moment je considérais que je prenais en charge un enfant ce qui n'est pas pareil que d'en désirer absolument un. Finalement ça n'a pas abouti.

Et puis je ne sais pas si c'est une bonne idée, et je réponds un peu à rebrousse poils, mais comme dit précédemment le sujet me touche particulièrement . . . lira qui voudra !

Les enfants c'était surtout "bien avant" que je me posais la question, j'avais une sorte d'envie confuse de descendance, sans doute amplifiée par le fait que j'étais le dernier exemplaire de la branche de la famille . . .

J'ai eu la chance d'en avoir deux (des enfants je précise . . ) et ce fut réellement un cadeau du ciel.

Par la suite il y a eu le divorce, la bagarre pour les enfants (je précise bien pour les enfants et non pas contre leur mère même si je n'en pensais pas moins à son sujet)

C'est à ce moment que je me suis découvert un côté anormal (combien de fois ai-je perçu dans les discours et les comportements qu'un père qui s'intéresse autant à des enfants très jeunes ne doit pas être si normal que ça)

A la réflexion c'est peut être ça le déclencheur que nous évoquons par ailleurs avec Morgane . . une sorte d'instinct maternel qui me fait penser aussi à nos discussions sur la féminité . . . c'est en effet l'époque où je me suis lancée . . .

Par la suite on a mis en place une résidence alternée, une semaine chez l'un, une semaine chez l'autre . . . et qui a évolué depuis, toujours selon les modalités proches du 50/50, mais aussi toujours en faisant passer leur intérêt en premier.

Mais il n'empêche que pendant longtemps, lorsqu'ils revenaient après une semaine chez leur mère, ils m'appelaient spontanément "maman" au moins la première journée après leur retour . . . je sais bien qu'il y a d'autres explications, mais quelque part ça fait drôle . . .

Maintenant qu'ils sont beaucoup plus grands, je me suis mise à pratiquer avec eux des activités de garçons car c'était un besoin qu'il fallait légitimement combler, je considérais ça comme une responsabilité, mais je reste souvent surprise par la relation qui a été mise en place avec eux, nous discutons souvent sur le mode de la confidence, j'ai souvent le sentiment que je joue aussi un rôle de maman . . . et comme je l'ai dit par ailleurs ils ont compris beaucoup de choses, notamment dans les armoires, je me fais souvent "chambrer" à ce sujet car ce sont maintenant des petits mâles qui ont leur caractère, mais c'est plus avec la gentillesse du discours envers une mère ou tout du moins une femme qu'avec la rudesse d'une discussion entre mâles . .

Par exemple aussi leur mère a essayé sans grand succès de les intéresser à des activités relevant typiquement du cerveau gauche (sophro, relaxation, etc), et c'est vers moi qu'ils se sont tournés spontanément pour en parler et approfondir . . . ça interpelle (à gâteaux si Chantal me lit, lol)

Cette relation avec mes gones, c'est assurément aussi la raison principale pour laquelle je souhaite maintenir ce compromis tellement frustrant entre mes deux vies de chaque côté de la barrière . . . de la souffrance mais tellement de bonheur aussi !

Bises à toutes

Stephanie Dupont a écrit:
c'est vers moi qu'ils se sont tournés spontanément pour en parler et approfondir . . . ça interpelle (à gâteaux si Chantal me lit, lol)

Je te lis toujours, Stéphanie, je suis la Big Sister qui surveille, analyse, dissèque , classe, répertorie tous tes épouvantables calembours qui te vaudront l'enfer des blagueuses pour l'éternité, avec même une prolongation de peine dans ton cas !

ester a écrit:je considérais que je prenais en charge un enfant ce qui n'est pas pareil que d'en désirer absolument un.

Tout à fait d'accord avec toi Ester, c'est pourquoi j'ai précisé que le désir ressenti allait de l'envie "d'être fécondée" par mon amant, jusqu'à la mise au monde, et n'incluait pas du tout l'éducation. Je serais juste heureuse de porter un enfant de lui. Mais c'est peut-être le développement d'un instinct maternel, découvert sur le tard, exprimé par le beau témoignage de Stéphanie ?

Ce qui me rassure au vu de vos réponses, c'est de voir que ce sujet traverse certaines d'entre nous, et n'est pas juste une lubie de ma part.

Bises

Danièla